CETTE QUINZAINE (ou plus précisément : ces dernières semaines)
⚖️Le dilemme : Ci-gît. C’est ce que l’on peut être tenté de penser quand on examine la portée réelle du droit international. Loin des codes, des cours magistraux, des déclarations et des poignées de mains, le droit international « de la vie réelle » touche à ses limites. Des mesures conservatoires sans moyens de les faire respecter, des Etats qui se jouent des institutions supra-étatiques, des formulations sujettes à interprétations : le droit international devient (presque) ce que les Etats en font.
Au-delà des funestes exemples dans notre actualité, la Cour internationale de Justice – poussée par 190 Etats – a rendu un avis sur l’une des questions juridiques les plus fondamentales de notre époque : quelles sont les obligations juridiques des États et entreprises face à la crise climatique ?
Les obligations juridiques déjà contenues dans les textes ont donc été clarifiées pour tenir compte du droit international de l’environnement, des droits humains et des coutumes ; mais aussi pour préciser les conséquences juridiques en cas de manquements. A l’unanimité, la CIJ a donc décrété haut et fort que : la lutte contre le chgmt clim. constituait une obligation légale (donc contraignante) afin qu’un environnement propre, sain et durable soit un préalable à la jouissance des droits humains (à la vie, la santé, un niveau de vie adéquat). Et par conséquent, que des actions de prévention, de réparation et de coopération doivent être mises en place par les Etats. Les traités internationaux et obligations qui en découlent doivent donc « s’éclairer mutuellement ». L’heure n’est donc pas encore à sceller l’épitaphe du droit international (et mes idéaux d’étudiante en Droit).
🚦Ce qu’il ne fallait pas rater :
– Heureux mouton. Il se passe quoi quand, pendant un JT de 20h, une personnalité reconnue sur la question des énergies et appréciée du grand public évoque une alternative au « tout clim’ » à travers l’existence des puits canadien ? +61% de recherches sur une semaine (à comparer à une semaine dans les mêmes conditions de canicule). Un parti pris éditorial + la présence d’un.e experte + une heure de grande écoute, et l’intérêt décolle.
– Fond de classe. Le dernier rapport de Reporters sans frontières (RSF) sur l’état de la liberté de la presse dans le monde indique qu’en 2025, la France dégringole de la 21ème place à la 25ème. En cause, une multitude d’offensives, à commencer par la concentration des médias entre les mains de quelques-uns et une série de réformes législatives qui pressent l’expression journalistique comme un citron (et notamment le travail d’investigation).
– Boulimie. Les aliments ultra-transformés ont des effets négatifs forts sur la santé en moins de temps qu’il ne faut pour le dire (dégradation de la santé cardio-métabolique, perturbation de l’équilibre hormonal, altération de la fertilité masculine, etc.). En revanche, on ne sait pas toujours si c’est l’ultra-transformation ou les quantités excessives consommées qui sont en cause. Une information à intégrer, en même temps que sort le livre « En finir avec les idées fausses sur l’alimentation » de B. Sèze. Plutôt que de faire porter la responsabilité sur les consommateurs ou producteurs, l’invitation consiste donc à se tourner vers les industriels et politiques.
– Self care. Réunis lors de l’Africa Climate Summit, les dirigeants africains ont cherché à faire apparaître leur continent comme un pourvoyeur de solutions au dérèglement climatique et à peser dans les négociations de la COP 30, martelant qu’ils n’étaient pas là pour « négocier leur survie » mais pour « créer l’économie climatique de demain », en mobilisant et en sécurisant leur propre capital.
– Cordon sanitaire. Lors du festival de journalisme de Couthures, la RTBF a expliqué comment elle avait diffusé l’investiture de D. Trump avec 2 minutes de différé, pour prendre le temps de l’analyse journalistique. On aime cette modération.
📖Les (multiples) lectures:
– « Réduire au silence : comment le droit est perverti pour bâillonner médias et ONG », S. Lemaître, Ed. Rue de l’échiquier. Ce livre met en lumière les menaces virtuelles et physiques, l’espionnage, le fichage, les procédures bâillon, l’isolement qui pèsent mondialement sur les défenseurs de causes d’intérêt général (environnement, justice fiscale, information, etc.), et propose les bons réflexes et les personnes ressources.
– « Bien traiter l’environnement dans les médias », B. Héraud et V. Laramée de Tannenberg, Edisens. Un ouvrage qui rappelle les fondamentaux de l’écologie scientifique et du traitement journalistique spécifique aux questions d’environnement, de climat ou de biodiversité.
– Face aux polémiques et fake news qui gravitent autour des énergies renouvelables, lire la note de la Commission de régulation de l’énergie intitulée « Débats sur l’énergie : démêler le vrai du faux ».
– « Substack, ou le mirage de l’indépendance », M. Slavitch. Un article qui revient sur les travers de cette plateforme de newsletters, qui donne l’illusion d’une parle libérée d’un contact direct avec ses lecteurs, mais qui précarise en réalité ses auteurs.trices.
– « Burn out militant. Comment s’engager sans se crâmer », H. Balazard, S. Cottin-Marx, Payot.
– Le post Linkedin d’Hugo Coignard dans lequel il explique comment son enquête journalistique sur la contamination aux gaz CVM dans la métropole lyonnaise a été rendue possible grâce à l’aide de l’intelligence artificielle. Une démonstration intéressante, qui invite à se plonger dans les conclusions du rapport publié en juin dernier intitulé « IA & environnement : sortir du brouillard informationnel » .
– Faire un tour par le « Plan d’action pour la préservation des sols forestiers », publié fin juillet, qui prévoit notamment l’amélioration de la connaissance de ces sols, des pratiques et équipements à faible impact lors de l’exploitation du bois, la formation de référents sols forestiers, la sensibilisation des professionnels sur la gestion durable et l’encadrement des facteurs de pressions etc.
💡L’inspiration : 600 voisins du 14e arrondissement de Paris s’apprêtent à devenir copropriétaires d’un lieu commun rassemblant atelier de réparation, pôle de santé, lieu d’entraide inter-générationnelle, activités culturelles, etc. Si l’accompagnement en « intelligence collective » risque de donner des sueurs froides à plus d’un.e animateur.rice, ce projet unique mérite d’être scruté (en pleines journées portes ouvertes de l’habitat participatif).
🕺🏼Le swag : Pour redonner la fame au papier, et réhabiliter les kiosques à journaux aux coins de rue, le média Climax a eu la savoureuse idée de transformer l’un de ces lieux en club éphémère, où il faisait bon feuilleter son dernier numéro « Ambiance scandale », et swinguer aux sons des platines en parlant avenir de la presse écrite et indépendante. Perso, je signe !
👍🏼La bonne idée : Pour prendre soin de la planète, et de son porte-monnaie, Télécoop propose un forfait de téléphone dégressif en fonction du nombre de gigas consommés : 18 euros par mois les 20 go, mais 14 euros les 5. Une action concrète et accessible pour réduire l’impact carbone du numérique.
🔎Le chiffre : En moyenne, les principaux lobbys « conventionnels » disposent de moyens 35 fois supérieurs à ceux des lobbys « d’intérêt général », selon des propos avancés cet été à l’@Académie du climat par Green lobby. Biensûr nos parlementaires doivent s’appuyer sur des arguments reçus de la société civile pour élaborer/amender les textes, biensûr les moyens d’un bord et de l’autre sont très inégaux, et donc bien évidemment, l’intérêt général peine à percer. Mais se former pour peser dans les échanges d’influence et comprendre qu’il est plus risqué de laisser faire que d’agir sont notre portée.
La phrase: « Il faut repenser le logement pour raccrocher les classes moyennes au pacte social », Nicolas Laine, de l’Institut Montaigne. Lumière crue sur le mirage de l’accession à la propriété pour les classes moyennes, tandis que les prix hors inflation du logement ont progressé de 88 % en 24 ans, obligeant à s’endetter 10 ans de plus, et demandant un effort plus important au détriment du pouvoir d’achat.
CE QUE JE VOUDRAIS VOIR PLUS SOUVENT
Cet été, Airparif a relevé une nette amélioration de la qualité de l’air en Ile-de-France en dix ans.
AVANT DE PARTIR
– Pour les lyonnaises et lyonnais, le premier festival « La mécanique de l’info » à l’initiative de Rue89, Médiacités, We report, le Fonds pour une presse libre et Forbidden stories se déroule ce samedi.
– La France va accueillir la 4e conférence ministérielle des diplomaties féministes, les 22/23 octobre prochains. Devoir en faire un événement à part entière démontre à quel point la situation est préoccupante. Donc faisons entendre nos voix pour garantir les droits des femmes, renforcer leur autonomisation, leur participation à la vie publique et éliminer les violences à leur égard.